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la télémédecine et le futur ?
Autant laisser parler un
spécialiste:
Professeur Bernard GLORION, Président du Conseil National de l'Ordre
des Médecins
Ma conclusion sera relativement simple car si je dégage quelques
idées à travers ce que j'ai entendu aujourd'hui, nous sommes une
fois de plus confrontés à une situation que les médecins connaissent
bien qui est directement liée au progrès mais qui doit nous rappeler
aussi que notre métier et notre profession a une mission tout à fait
particulière et particulièrement humaine : c'est le conflit entre la
machine et l'homme.
Finalement on va se trouver encore en face d'une situation nouvelle
que l'on a déjà connue. Je cite souvent cette phrase d'Alfred Sauvy
qui dit que "le progrès nous condamne à perpétuité", c'est-à-dire
que nous ne pouvons pas refuser le progrès, et nous ne pourrons pas
refuser la télémédecine. Je ne connais pas de technique mise à la
disposition de médecins qui ait été refusée et dont on n'ait pas
usé.
Il ne faut même pas se poser de questions : la télémédecine va
envahir la médecine dans les années à venir.
De l'autre côté, je dis qu'il y a les hommes, c'est-à-dire le malade
et le médecin, et la question qui se pose c'est de savoir dans la
relation entre le malade et son médecin comment la télémédecine va
intervenir au même titre qu'il n'y a pas tellement longtemps, et
c'était déjà l'ébauche de la télémédecine, on nous avait fait
miroiter des cabinets d'imagerie où il y avait des opérateurs dans
une salle, d'autres qui étaient les interprétateurs dans une autre
salle, les images passaient de l'un à l'autre, c'était déjà
l'ébauche de la télémédecine, mais l'on avait interposé entre le
médecin et le malade un certain nombre d'appareils qui sont
absolument nécessaires et qui risquent de perturber un peu cette
relation fondamentale à laquelle on tient beaucoup et dont l'Ordre
des Médecins est le garant.
C'est la raison pour laquelle si j'avais quelques recommandations à
faire en fin de journée, je rappellerais simplement qu'après vous
avoir entendus et après avoir bien entendu réfléchi au problème au
contact de Mme DUSSERRE et de M. DUBOIS, on peut passer en revue
cinq idées qui sont toutes les grands fondements de la déontologie
et se demander si elles sont compatibles avec la télémédecine, si ce
n'est pas nous qui les rendront compatibles par nos comportements et
non pas la télémédecine qui nous imposera quelque chose :
L'indépendance
On ne peut pas imaginer que le médecin devienne l'esclave de la
télémédecine. Il peut l'utiliser, il peut ne pas l'utiliser. Ce qui
est primordial c'est de savoir si ce sera utile au diagnostic et à
la thérapeutique. Donc le choix, c'est de conserver son indépendance
en faveur de l'intérêt du malade.
La compétence
Tout à l'heure j'ai fait des réflexions peut-être un peu dures mais
je suis consterné de penser que l'on introduise constamment dans le
débat l'élément suivant : est-ce que celui qui est au bout est
compétent ?
On n'en sortira jamais. Par définition, il faut que nous soyons tous
compétents. Il n'y a pas de discussion, et quand on parle de
formation médicale continue et de recertification, je dirai oui tout
de suite, s'il faut que l'on soit compétent, on ne pourra pas l'être
autrement.
Donc la notion de compétence me paraît presque élémentaire, c'est à
chaque médecin dans sa responsabilité de s'assurer que l'équipe avec
laquelle il travaille et le référant soient compétents. Mais le
référant, il a un nom, il a une identification, il le connaît.
Beaucoup de médecins on dit que l'on avait plutôt l'habitude de
travailler avec des correspondants que l'on connaissait, il faut se
connaître et il faut connaître la compétence de l'autre.
L'information
C'est l'information du malade qui doit savoir que l'on va utiliser
la télémédecine. La qualité de l'information qui va transiter est
une valeur déontologique fondamentale, et on ne peut pas éviter de
donner des informations au patient quand on utilise la télémédecine,
et on ne peut pas ne pas être très exigeants sur les informations
qui nous sont transmises.
Le secret médical
Il y a des clefs partout, c'est un problème technique. Ce qui est
important pour moi c'est de dire que la télémédecine devra comporter
aussi une sécurité fondamentale dans le domaine du secret médical.
La liberté
C'est l'indépendance. C'est la liberté de se récuser si l'on sent
que l'utilisation de la télémédecine va compromettre la qualité de
l'acte médical. C'est la liberté pour le malade de dire "je ne veux
pas que l'on consulte un expert par l'intermédiaire de la
télémédecine". C'est la liberté de l'un de choisir l'autre. C'est la
liberté aussi de se récuser. C'est la liberté de se quitter.
Donc il faut laisser émerger indépendance, compétence, information,
secret médical et liberté comme étant les grands fondements de la
déontologie dont nous avons la charge, ce qui me paraît parfaitement
compatible avec la télémédecine. Tout dépend du comportement et de
la volonté de chacun. Car je ne pense pas que ce mythe de la machine
doive nous arrêter dans notre mission et doive nous arrêter dans
tout la construction d'un système de santé autour du malade, au
bénéfice du malade, en utilisant au mieux tous les moyens techniques
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